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Dessine-moi la liberté d’expression en Afrique !
« Sur le continent aux 2000 langues et à l’alphabétisation subsidiaire, quoi de mieux que le dessin comme langage universel ? Sur le territoire de la jeunesse majoritaire, de la presse souvent adolescente et de l’humour prescrit, quoi de mieux que la satire comme outil de déminage des autocraties ? Sur des terres où se confrontent parfois systèmes politiques ancestraux, trompe l’œil démocratique et tabous inexpugnables, quoi de mieux qu’un journalisme graphique décalé ?…
Singulièrement depuis le « Printemps de la presse » des années 90, le « cartoon » africain est devenu le cheval de Troie qui investit les forteresses des régimes répressifs. Il est tout à la fois feinte de la censure et coup de poing frontal à des mohamets autoproclamés. Il s’impose par le biais artistico·humoristique mais non sans peine ; le Sud-africain Zapiro, I’Algérien Dilem, le Zimbabwéen Nomote ou feu Azzo, le Sierro-Leonais, ont connu les procès, les incarcérations ou les agressions parfois fatales. Et lorsque le dessinateur de presse finit par conquérir sa place dans l’univers médiatique, il est souvent confronté à l’autre pression de l’étau : l’aridîté économique. Là, un Sahélien sera libre mais payé au lance-pierre. Ailleurs, un Africain austral sera rémunéré à sa juste valeur, pour peu que sa plume ne soit pas contrainte. Car sur un continent de 54 pays, il n’y a pas qu’une Afrique…
Malgré ces différences de contextes, « les Afriques » satiriques se reconnaissent dans le trait qui esquisse une liberté d’expression aussi joyeuse que grave. Elles se solidarisent, se « likent », s’enchevêtrent et s’exposent parfois, sous la houlette d’associations comme Cartooning for Peace. Le regard transnational devient le garant de la sécurité des cartoonists et de la valorisation de leur travail. C’est dessin par dessin que la liberté d’expression se conquiert, car la pensée sahélienne l’enseigne : « si la termitière vit, c’est qu’elle ajoute de la terre à la terre ». La termitière du dessin de presse continental ne cesse de poindre vers le ciel des droits de l’Homme. D’ailleurs, quand caricaturistes et politiciens jouent au chat et à la souris, il est parfois difficile d’identifier qui est le félin et qui est le rongeur… »
Damien Glez (Burkina Faso), dessinateur de presse et éditorialiste
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